Malthus n'avait
pas dû lire l'histoire de Saint-Domingue sinon il n'aurait
pas eu une vue si pessimiste sur les possibilités de production
agricole de la planète. Avec le recul actuel tout le contredit
: les moyens modernes permettent en effet une croissance presque
illimitée de la production agricole et, tout en restant
très en dessous du potentiel biologique, la Chine nourrit
correctement plus d'un milliard d'habitants soit plus que la totalité
des habitants du monde du temps de Malthus. Même au XVIIIe
siècle, avant les progrès de l'agronomie moderne,
on pouvait déjà produire beaucoup. La partie francophone
de Saint-Domingue (correspondant à l'état actuel
de Haïti) avec ses 27 000 km2 produisait beaucoup plus que
l'île de Cuba, quatre à cinq fois plus grande, et
suffisait à ravitailler en denrées coloniales (sucre,
café, cacao, gingembre ...) la France, qui était
à cette époque le pays le plus peuplé d'Europe.
Quatre cent navires partaient chaque année de Port aux
Princes ou du Cap Français pour apporter ces précieuses
denrées qui n'étaient pas réservées
à la cour de Versailles mais avaient progressivement conquis
toutes les couches sociales des milieux urbains.
Pour cela des investissements importants avaient été
effectués depuis le début du siècle, amélioration
des plantations, irrigation, "usines" d'extraction du
sucre mais surtout main-d'oeuvre car 500.000 esclaves étaient
là pour assurer cette prospérité. Tout le
système fonctionnait grâce à de dynamiques
entrepreneurs ; ce n'étaient pas seulement des nantais
ou bordelais. Beaucoup de français disposant de capitaux
avaient investi tout au long du XVIIIe siècle. Cela avait
été le cas du frère du grand-père
de Constance de la Rochejaquelein : Gaspard de Gousse de la Roche
Allard. Constance avait reçu cette plantation dans son
contrat de mariage. En fait elle n'en possédait que la
moitié car 50% appartenait à un associé.
Mais l'affaire ne rendait pas comme on pouvait l'espérer.
Et le Marquis de la Rochejaquelein sera particulièrement
entêté à tout miser pour faire rendre à
ce domaine ce qu'il en avait rêvé. Il s'imaginait
que la mauvaise gestion était due à l'indivision
; il s'endetta pour racheter sa part à Monsieur Collier
de Longpré et y envoya comme régisseur un des bons
officiers de son régiment, Monsieur Toulzac.
Mais à peine ces dispositions étaient-elles prises
que les événements survenus à Saint-Domingue
vinrent ruiner ses espoirs. L'histoire des douze années
de troubles, 1791-1803, est extrêmement complexe. Pour ce
qui est des habitants de l'île, il y avait les colons blancs
au nombre d'une trentaine de mille, les mulâtres (appelés
généralement gens de couleur) de 30 à 50.000
et les 500.000 noirs. Mais la grande erreur des dernières
années fut de trop favoriser les cultures d'exportation
en négligeant les cultures vivrières. La main d'oeuvre
était souvent mal nourrie ce qui conduisit à la
prolifération des "nègres marrons", c'est
à dire ceux ayant choisi la fuite vers les montagnes pour
se soustraire à l'esclavage. Ils préexisteront aux
périodes troubles de la Révolution et en seront
les principaux noyaux de révolte notamment lors de la grande
révolte des esclaves le 22 août 1792. La suite de
l'histoire n'est pas simple puisque les noirs se révolteront
en faveur du Roi qui leur paraissait garant d'une mission d'humanité.
Il faut dire qu'au début les colons ont une attitude opposée
au pouvoir de Versailles, un peu de la même façon
que les "insurgents" en Amérique. Tout est bien
calculé en effet par le pouvoir central : la colonie rapporte
d'abord à la France par toute une série de contraintes
réglementaires qui indisposent fortement les colons et
dont certaines sont contournées par des exportations clandestines
(en chargeant des navires directement en haute mer sans passer
par les ports royaux). Pour les Etats Généraux,
ce sont donc des contestataires qui représentent Saint-Domingue.
Les élus de l'île ont été choisis parmi
les 6.000 propriétaires blancs, mais ils ont voulu proportionner
leur nombre aux 500.000 habitants totaux de l'île, ce qui
n'a pas manqué de créer certains remous et fera
ramener après discussion le nombre des élus à
six.
Mais la "France des Lumières" est consciente
du poids économique de Saint-Domingue et l'on cherche les
moyens "d'allier la conservation des colonies, des propriétés
des colons et l'entretien de leurs ateliers avec l'abolition de
l'esclavage et de la traite".
Pendant dix ans, l'île sera en ébullition avec des
clans mal définis dans lesquels jouent un rôle le
mulâtre, Vincent Ogié, le noir Toussaint Louverture,
les envoyés de la Convention, ceux que la Marquise appellera
les "infernaux commissaires "Son-thonax et Polverel"
puis pour finir le beau-frère de Napoléon le Général
Leclerc qui rétablira l'ordre et ramènera Toussaint
Louverture prisonnier (il mourra en captivité dans le Jura)
: 10 ans de guerre, de massacres et de pillages où interviendront
également les troupes anglaises et les troupes espagnoles.
La famille la Rochejaquelein paraîtra épisodiquement
sous le drapeau des troupes anglaises puisque, à partir
de novembre 1794, le Marquis sera Colonel d'une légion
anglaise. Son fils Louis sera Capitaine d'abord sous ses ordres,
puis dans d'autres régiments. Enfin Auguste s'enrôlera
dans la marine anglaise. La plantation familiale était
située entre Port aux Princes et Jérémie,
donc dans la presqu'île qui s'étend d'Est en Ouest
sur vingt-cinq lieues de long. Située sur la paroisse de
l'Anse à Veaux, la propriété du Baconnois,
mesurait 3/4 de lieue sur 1/2 lieue, c'est à dire sans
doute environ 600 hectares sur lesquels travaillaient et vivaient
250 nègres. Pour le tiers de cette exploitation le Marquis
a payé 100.549 livres. Il lui fallait payer ses dettes
d'où l'acharnement qu'il mit à essayer de bien faire
tourner cette entreprise. Pour bien comprendre la situation que
les deux soeurs vont trouver aux Antilles, il faut revivre les
derniers moments de leur mère. Voici la dernière
lettre adressée par Constance à sa fille Anne. Cette
lettre est écrite à Kingston juste avant qu'elles
ne partent pour Saint-Domingue.
9
Août 1795
J'ai reçu ta petite lettre ma chère Annette
par le dernier packet, je ne sais pas quand il partira, mais
je commence une réponse afin qu'elle soit prête.
Je crois bien qu'elle ne sera pas aussi longue car mes idées
sont toujours les mêmes et encore plus enveloppées
d'un nuage noir. Les gazettes nous parlent toujours de la
perte que nous avons faite de notre cher Henry ; les apparences
sont toutes que ce n'est que trop vrai. Ah mon Dieu ! je n'aurai
la satisfaction de lui témoigner combien sa conduite
avait été précieuse pour moi. Oh ! je
suis trop malheureuse ma chère Annette, je n'ai pas
la force d'écrire, c'est un coup mortel pour moi, ma
vie ne sera plus qu'un chagrin continuel. Mes chers enfants
vous partagez souvent mes peines. Si je pouvais pleurer avec
vous je serais soulagée. Je demande sans cesse à
Dieu d'avoir pitié de moi qu'ai-je fait pour qu 'il
m'écoute! Votre innocence et vos prières le
toucheront peut-être. J'avais jusqu 'ici conservé
quelques espérances, mais je vois bien que je n'en
peux plus avoir. Que de mères aussi affligées
que moi, mais il n'y en a peu qui pleurent un fils comme celui-là...
Ma chère Annette nous avons perdu toute espèce
de satisfaction puisque nous ne pouvons pas secourir les malheureux.
Ton père et moi, nous nous portons assez bien. Je ne
comprends pas comment notre santé se conserve. Il faut
bien que Dieu ait pitié de nous.
11 Août... le packet ne part que le 19, mais il faut
mettre les lettre à la poste, je finis donc celle-ci
mes chers enfants, en vous embrassant de tout mon coeur qui
est très déchiré.
22 Août ...le packet n'est toujours pas parti, nous
partons lundi 24 pour Jérémie ... ". |
Pour Jérémie,
c'est à dire Saint-Domingue où elle devait mourir
sans revoir ses enfants. De son dernier séjour, elle a
peu écrit. Il faut dire que sa vie ne fut pas de tout repos
...
Après des périodes de rudes batailles, le ménage
la Rochejaquelein devint agriculteur dans une petite ferme près
de Jérémie (Août 1797/Juillet 1798). Ils avaient
une seule vache et des poules et en vendaient les produits à
la ville. Elle écrivit à sa belle-soeur, Madame
de Suzannet "nous sommes très mal logés,
avec une espèce d'herbe qui ressemble à de la paille,
et qui est si mal arrangée qu'il pleut partout. Nous faisons
notre cuisine dans la chambre ; mais nous avons presque le plus
beau climat de la colonie. Il ne fait jamais ni trop chaud, ni
trop froid... Nous nous donnons de la peine. Ton beau-frère
travaille plus que je ne l'aurais jamais cru capable et il se
porte très bien. Mais le service de ces gens noirs est
bien détestable ; il faut l'éprouver pour le croire".
En Novembre 1798, le Marquis de la Rochejaquelein était
retourné à Kingston tandis que sa femme était
repartie au Baconnois pour empêcher que l'habitation ne
soit mise sous séquestre. Elle y mourut le 14 Frimaire
an VII (4 Décembre 1798). C'est après avoir appris
la mort de leur mère qu'Anne et Louise avaient pris le
parti de s'embarquer pour les Antilles où elles arrivèrent
en Décembre 1799 soit exactement un an après la
mort de leur mère. Pour ce qui est de leur séjour
le mieux est de donner la parole à Charles de Beaucorps
:
"En apprenant la mort de leur mère, Anne et Louise,
n'écoutant que leur amour filial, prirent le parti héroïque
de s'embarquer pour les Antilles afin de retrouver leur père
et de partager ses épreuves. Arrivées à Kingston,
en décembre 1799, elles le trouvèrent bien vieilli
et usé par le climat. S'étant fixées avec
lui aux environs de Kingston, elles eurent le regret, peu après
leur arrivée, de le voir se remarier avec une créole,
madame veuve Espent qui possédait des propriétés
à la Jamaïque. Voulant se procurer un moyen d'existence,
Anne, avant de quitter Londres, avait pris des arrangements avec
un négociant, Monsieur Masquer pour qu'il lui envoyât
des marchandises à vendre. Il lui adressa donc, chez Monsieur
Davidson, négociant à Kingston toutes sortes d'objets
et de denrées qu'elle se chargeait de placer en prélevant
une commission de 5 pour cent. Tous les frais de transport, de
magasinage, de correspondance, demeuraient à la charge
de Monsieur Marquer. Celui-ci n'eût qu'à se louer
de sa correspondante, aussi intelligente qu'active, et d'une telle
délicatesse qu'à peine voulut-elle accepter les
bénéfices usités en pareil cas.
Les envois de marchandises entre la métropole et la colonie
n'allaient pas sans risques en ces temps de guerre maritime. Au
début de l'année 1800, de nombreux paquebots anglais
furent pris par les Français. Les denrées de consommation
arrivaient parfois en mauvais état. Ainsi des barils de
salaison se trouvèrent presque entièrement gâtés.
Aussi préférait-on de part et d'autre, les articles
de luxe et de mode : bonnets, chapeaux, dentelles, fleurs, éventails,
etc ...Ils couraient moins de risques. Mais, pour bien vendre,
il fallait s'enquérir des goûts des clients. Anne
de la Rochejaquelein s'en tirait à merveille. "-Je
ne sais comment reconnaître, lui écrivait M. Marquer,
tous les soins que vous prenez de mes petits intérêts.
Tous ces détails ne sont point amusants, et vous vous en
acquittez comme une personne versée depuis longtemps dans
le commerce". M. Marquer marié à une française,
Mlle de Beaurepos, était en relations suivies avec les
familles de Suzannet et de Royrand et s'intéressait vivement
aux émigrés. Aussi cherchait-il à procurer
à Anne de bonnes affaires. Il lui arriva, sans le vouloir,
de lui en imposer une mauvaise. Les deux soeurs, en effet, pour
se procurer des ressources supplémentaires, s'étaient
mises à fabriquer des chapeaux, et elles y réussissaient
fort bien. Or voilà qu'en Décembre 1800, un navire
leur apporta de Londres toute une cargaison de chapeaux. Elles
crurent de leur devoir de les écouler de préférence
à ceux de leur fabrication. M. Marquer en fut désolé,
et pour réparer le tort qu'il leur avait involontairement
causé il proposa aux deux soeurs une combinaison qui leur
assurait un plus fort bénéfice sur certaines marchandises.
N'ayant presque plus de travail à la campagne, où
elles résidaient avec leur père depuis leur arrivée,
elles se décidèrent, en Janvier 1801, à s'établir
à Kingston où elles monteraient une pension et trouveraient
plus de facilité pour leur commerce. Elles apprirent alors
qu'une famille d'émigrés français réfugiés
à Kingston, les Roumefort songeaient à sous-louer
la moitié de la maison qu'ils occupaient. Les deux soeurs
en devinrent locataires, et une grande intimité s'établit
entre les deux familles qui partageaient la même infortune
et avaient des amis communs. Les deux frères de Roumefort
venaient de perdre leur mère. Leur grand-père M.
de l'Hermitage était parti pour Saint-Domingue où
il avait des propriétés, confiant ses petits-enfants
à une demoiselle Bonnamy. Anne prit en affection la plus
jeune des Roumefort. La vénérable Madame Fauche
qui avait reçu le dernier soupir de Madame de Roumefort,
la traita comme sa fille, et Melle Bonnamy comblait aussi les
deux soeurs d'attentions et d'égards. Dans leur isolement
cette intimité leur fut bien précieuse. Tout en
continuant à faire du commerce pour la maison Marquer,
Anne organisa dans le courant de l'année 1801, un pensionnat
de jeunes filles. Les familles les plus considérées
de Kingston lui confièrent leurs enfants. Elle n'acceptait
d'ailleurs que celles qu'elle jugeait dignes d'elle. Connaissant
l'anglais aussi bien que le français, Anne faisait la classe.
Sa soeur donnait des leçons de dessin et de broderie et
le reste du temps confectionnait des chapeaux de paille avec une
rare adresse. Le dimanche on se réunissait à la
même table que les Roumefort. Monsieur de la Rochejaquelein
qui résidait habituellement à la campagne chez sa
seconde femme venait souvent avec elle voir ses filles.
Elles avaient aussi souvent de fréquentes visites de leur
frère Auguste qui s'était enrôlé dans
la marine anglaise. Il montait la frégate Apollo qui croisait
souvent dans les Antilles".
Pendant ce temps leur père continuait à mener une
existence périlleuse, essentiellement axée sur son
idée fixe de récupérer le Baconnois. Lors
d'un passage entre Saint-Domingue et Kingston son navire fut attaqué
par des corsaires ; il se défendit héroïquement,
perdit un bras et fut conduit à Santiago de Cuba presque
mourant. Il se rétablit cependant et en Octobre 1801 il
prévoyait de se réinstaller à Saint-Domingue.
Anne essaya de le convaincre de rentrer en France :
"Marquez-nous décidément, lui mandait-elle,
si vous ne voulez jamais aller à la maison. Vous voyez
comme nous sommes malheureux de tous les côtés et
combien nos parents que nous y avons, nous pressent d'y aller,
combien notre absence leur fait de tort, sans jamais pouvoir leur
rendre ce qu'ils font pour nous. Enfin, si vous vous êtes
bien passé de nous depuis plus de six mois, nous pouvons
bien croire que notre présence ici ne vous est pas plus
agréable que si nous étions à la Durbelière".
Il n'en fit rien, revint au Baconnais et écrivit à
Anne :
"Les forces françaises sont telles que cette ville
jouît de la plus grande sécurité, ton frère,
toi et ta soeur avez le plus grand intérêt à
venir me rejoindre. Votre fortune et celles de vos frères
et soeurs en dépendent. Tous les jours que vous passez
absents sont irréparables. Il n 'existe aucun danger. Tâchez
de vous embarquer sur un bon bâtiment et avec des gens de
connaissance. L'habitation roule et fait de beaux sucres. J'ai
commencé à rouler il y a eu lundi 8 jours. Vous
ne manquerez de rien ici et vous serez
dispensés d'éduquer les enfants des autres. Tout
doit vous déterminer. Le Baconnois est un paradis terrestre
: beau chemin, toutes sortes de légumes, du sucre, du coton,
du bois de campêche, du rhum ; pour faire de l'argent tous
les jours, une prairie couverte de boeufs et de vaches superbes,
de chevaux de la plus grande bonté, des chèvres,
des moutons, des dindes, des canards sauvages et privés,
comme à la Durbellière, des poules qui vous donnent
des oeufs plus qu'on ne peut en consommer, des écrevisses,
des tortues et du cresson d'eau dans la rivière qu'abreuve
un étang qu'improprement on appelle une mare. Enfin je
crois que si tu as une fois séjourné au Baconnois
tu le quitterais difficilement... Vous ne manquerez pas de domestiques,
il y a au Baconnais "26 négresses et 29 petits noirs".
Malgré l'amélioration de son moral et de ses conditions
de vie sa santé déclina et il envoya une lettre
d'appel au secours à ses filles qui arrivèrent le
30 Juillet 1802.
Anne était un peu chef de famille. Non seulement elle trouvait
de quoi subsister avec sa soeur, mais elle avait payé une
dette importante contractée par son père. Elle dût
repartir travailler et Louise se trouvait seule lorsque le Marquis
mourut le 6 septembre 1802.
Anne revint, et avec sa soeur elles essayèrent de mettre
la situation du Baconnois en ordre. La vie y avait repris et un
bon régisseur du nom de Rimbert s'occupait du domaine.
Ce qui était inévitable arriva : Les "brigands"
mirent la main sur le domaine et Rimbert put prendre la fuite.
Il ne restait plus rien à espérer de Saint-Domingue
et les deux soeurs sollicitèrent un passeport pour le retour
en Europe. Ce fut le Général de Rochambeau qui le
leur accorda. Donatien de Rochambeau était le fils du Maréchal
qui avait joué un rôle déterminant dans la
guerre d'indépendance d'Amérique et notamment à
Yorktown. Il était arrivé en 1793 pour lutter, pour
le compte de la convention, contre l'insurrection puis contre
les troupes anglaises en 1794, donc contre le Marquis de la Rochejaquelein...
Il était revenu comme commandant en second sous les ordres
du Général Leclerc, beau-frère de Bonaparte,
qui commandait en chef les 21.000 hommes envoyés pour rétablir
l'ordre. C'est à dire l'importance économique que
l'on attachait encore à cette île. Leclerc atteint
de la fièvre jaune était mort le 2 novembre 1802
et Rochambeau lui avait succédé. En 1803 l'armée
française alla de revers en revers essentiellement dûs
à des problèmes sanitaires. Anne et sa soeur avaient
donc fait le bon choix en regagnant la France ...
Pour clore ce chapitre une remarque s'impose : la famille la Rochejaquelein
avait une santé exceptionnelle. En effet les climats tropicaux
ne réussissent pas toujours aux Européens mais dans
cette période de désordres les conditions d'hygiène
n'étaient pas mauvaises, elles étaient épouvantables.
N'oublions pas que le Général Leclerc ne fut pas
seul à mourir dans l'ile : sur 43.000 hommes qui mirent
pied à terre de 1801 à 1803 moins de 8.000 revinrent
et sur les 35.000 qui moururent dans l'île plus des 2/3
moururent de maladie...
Le Marquis et la Marquise moururent d'épuisement, et à
plus de 50 ans ce qui contraste avec les dizaines de milliers
d'hommes morts entre 20 et 30 ans. Sur les quatre enfants qui
ont vécu, travaillé et guerroyé dans les
îles, il ne fut signalé aucune maladie grave. Comme
je le citais antérieurement la vie à Saint-Aubin
de Baubigné leur avait forgé une robuste santé.
(à suivre ...)
Georges de Beaucorps
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