Les informations
du jour : les banlieues sont en furie, un personnage célèbre
actuellement a dit : " ce sont tous des enfants de la
république
", eh bien à la bonne
heure ! Laissons donc la république soccuper de ses
" enfants ". En matière de désespoir
et de poubelles, elle sy connaît . De quoi voulez-vous
bavarder ? Des grèves à la SNCF ? Des mariages homosexuels
en Europe ? Bof. Et la Vendée cela vous dit ?
Les guerres
de Vendée, oh oui bien sûr, tout le monde connaît.
Les mémoires de la célèbre marquise, le pardon
de Bonchamps, la Virée de Galerne, les colonnes infernales.
Vous avez bien lu au moins un ouvrage sur ces évènements,
visionné une cassette vidéo ou assisté à
une conférence sur le sujet.
Etes-vous
sûr pourtant de bien connaître la Vendée, votre
Vendée ? Les Lucs-sur-Boulogne, Chanzeaux, Les Aubiers,
Le Loroux-Bottereau, La Gaubretière, Cholet, on sait à
peu près tout ce qui sy est passé. Mais le
reste quen savez-vous ? Connaissez-vous bien les vieux chemins
que vous empruntez chaque jour ? Vous savez que Henri de La Rochejaquelein
ou Charrette ont dû passer quelque part non loin de votre
village, que là-bas près de cette vieille chapelle
en ruine, il se serait passé quelque chose, mai s quoi
exacteme nt , on nen sai t rien. Pourtant, sommes nous p
r ê t s à ne considérer de la Vendée
que de vagues sujets de commentaires sur la capacité dinsurrection
des Français au XVIII° siècle, des bavardages
sociologiques sur les résistances à la Révolution
ou je ne sais quelle grande théorie sur de prétendues
" pathologies collectives " engendrant le régime
de la Terreur. Ce genre douvrage peut évidemment
présenter un intérêt lorsque lon ne
connaît pas bien les événements, mais noublions
pas quils sont aussi le meilleur moyen de refermer définitivement
les pages de lHistoire en noyant la Vendée dans des
études sibyllines.
La Vendée
ne sétudie pas, ne se dissèque pas, elle se
raconte. On laccepte telle quelle est, et ceci est
dautant plus vrai que ses acteurs étaient des gens
simples qui nauraient pas conçu un seul instant que
lon puisse gloser interminablement sur leurs motivations.
La Vendée se raconte disions-nous, pourtant bien des détails
demeurent oubliés, et pourtant si faciles à reconstituer.
Comme ça, à tout hasard : Où se trouve le
fameux " pont du Gué Paillard " où
Henri de La Rochejaquelein tenta de rallier ses troupes en juillet
1793, lors du combat du Bois des Chèvres prés de
Nueil ?
Ce pont aujourdhui
nommé " Pont-Paillard " se situe sur un
vieux chemin, qui nest autre que lancienne route de
Châtillon, dans le prolongement du Bois des chèvres.
Sauriez-vous situer avec précision la ferme de la "
Saugrenière " où Stofflet fut arrêté
le 23 février 1796 ? Non loin des " Cabournes
", au sud de Neuvy-en-Mauges. Et le Mont des Alouettes, qui
vous dira que lun de ses moulins disparus était à
la place exacte de lactuelle chapelle ? Plus difficile à
présent : Sait-on que le prieur de labbaye des Fontenelles,
oncle du chef Vendéen William Bulkeley, resté envers
et contre tous seul dans son abbaye, près de La Roche-sur-
Yon, fut horriblement mutilé par une colonne infernale
? On lui coupa le nez et les oreilles et on le laissa agoniser
dans le couvent en flammes. Des paysans survinrent pour éteindre
lincendie et porter le malheureux dans léglise
où il expira. Sait-on, de même, quune vingtaine
de soldats républicains eurent la mauvaise idée
de tomber sur Marigny au carrefour de " Bel-Air "
près de la Chapelle de Beauchêne en Cerizay ? Ils
furent enterrés près dune forge dont il ne
reste aujourdhui quun pan de mur près dune
haie. Sait-on encore que lancien cimetière de "
Belle-Noue " près de Mareuil-sur-Lay fut témoin,
le 30 mars 1794 du massacre de 80 innocents, victime de la barbarie
de Goy-Martinière, aux ordres du sinistre Huché.
Pour finir avez-vous déjà été sur
la tombe du curé Jottereau à Beaulieu-sous-Bressuire
? Le malheureux prêtre fut massacré dès le
début de la guerre, mais sa sépulture existe toujours
Et que dire de la tombe oubliée du curé réfractaire
Violleau au cimetière de Montravers ?
Cette Vendée
qui se cache dans les haies, les lierres et loubli est toujours
là, nattendant quun esprit avide de découverte
pour se dévoiler. Certains ont cherché, et cherchent
encore des trésors de guerre de Vendée. À
Montorgueil, près du Poiré-sur-Vie, le trésor
de Charrette, les fusils enfouis dans la forêt du Parc-Soubise,
les canons dans la Loire. À moins dune monographie
paroissiale très complète, personne ne vous donnera
tous ces détails dans les ouvrages actuels sur la Vendée.
Cest à vous de raconter ce que vous savez, de donner
corps à cette histoire qui est celle de tous ceux qui aiment
ce pays. Lesprit de la Vendée ne peut survivre quavec
des récits. Ce sont eux qui suscitent lintérêt,
la soif de découverte.
Mais voilà
encore que je me laisse emporter par mes rêveries
Alors quun vent glacial souffle ce soir derrière
la fenêtre de mon bureau, je crois quest venu le temps
de laisser la Vendée nous bercer de ses songes.
Richard
LUEIL
Décembre 2005
|